Il y a des étapes et des messages qui vous arrivent comme cela en pleine figure...des rappels a l'ordre sur un age que les passions veulent oublier.
Bien sur ,il y a ce premier stade,où les garçons ont ramené des "fiancées",l'enfant devenu homme,bien sur,il y a eu le permis de conduire,l'autonomie,les premières invitations a diner chez eux,toute cette foule d'indices qui aurait du me laisser penser qu'ils étaient devenus des hommes.
Bien sur,nicolas est conseiller général,chef d'entreprise,mais lorsque j'ai entendu parler d'enfant a venir,c'est comme si les neurones n'imprimaient pas...
Et puis,je viens de prendre consience, parce que mon fils m'a donné un coup de pied au derrière, que c'était vrai,qu'un relais se passait et que ce que j'ai de plus cher au monde allait ressentir ce que je ressens.
alors j'ai eu envie de lui écrire cela :
Petite fille encore blottie dans le ventre de ta mère, en pleine concentration, en plein rassemblement de tes forces pour jaillir a la lumière, voilà que l’on m’annonce ta venue et que me voilà surpris.
C’est le signe que je prends de l’age, mon fils vient de décider pour moi de changer mon statut, de faire de moi un grand père, moi qui essayait en vain d’être un « grand » père »,moi qui suis en jean’s dans ma tête et qui rêve d’aventures et d’élevages de dromadaires.
Petite fille, j’attends tes rires, tes courses, tes dents blanches et tes bonheurs confiants, j’attends de lire dans les yeux de ton père, les inquiétudes et la fierté que j’ai pour lui.
Petite fille,en quelques jours,j’ai, tout d’un coup, hâte de te faire monter sur mon dromadaire et d’essayer de t’émerveiller de ce monde qui nous entoure,de te tenir par la main pour la naissance d’un poulain et de te porter sur mes épaules pour regarder s’envoler les flamants roses dans le delta du danube ,ou de te montrer pêcher l’ibis sur les bords du nil
Petite fille,tu vas porter un nom imprononçable,inéppelable,il va couler dans ton sang de l’ indien du Mexique,des effluves de juifs espagnols,de noblesse bretonne,d’autrichiens,d'italiens venus prêtés leurs bras et fuir la misère et des rives de l’Afrique,sur cette mosaïque on peut tout bâtir,mais surtout un monde de tolérance.
petite fille,je te présente tes ancêtres,ton arrière arrière arrière grand père lors de son baptême entouré de ses parents
Te voilà donc gatée,pas encore née et
déja la certitude que tu ne t'appelera pas dupont !
Indienne, africaine, juive , bretonne ,latino,teutonne te voilà équipée pour aimer la terre entière, car tous les hommes sont un peu tes frères.
Petite fille, rencontre improbable de tant de civilisations, tu vas promener ton inconscience et notre amour sur le chemin des cœurs.
Tu es notre héritage, notre alchimie familiale, notre flèche pointée vers le ciel, parce que c’est une chaîne d’amour qui conduit a toi, je te souhaite ce regard formidable si nécessaire pour le prendre tout entier, cet amour qui t’attend
Tu arrives dans une tribu, un clan, exigeant, latin, impossible, où tout est fusionnel ou n’est pas,ou tout est pudeur et paroxysmes, où l’essentiel s’exprime du regard, où les mots font parfois peur.
Petite fille,je veux que tu connaisses ton arrière grand-mère,la plus cinglée d’entre nous,qu’elle te parle de la guerre d’Espagne,des camps d’où elle faisait sortir les prisonniers,de ses milles aventures,de son regard sur la vie,de sa capacité a « ouvrir » les êtres et a avoir une passion pour toutes choses.
Petite fille que je n’ai pas vu venir, combien de larmes de bonheurs, d’émotions, d’inquiétudes te prépares tu a me faire couler, comment vais-je me défendre de ne pas t’aimer trop ?