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20 décembre 2013 5 20 /12 /décembre /2013 09:02

voici le texte intégral du courrier adressé ce jour au premier ministre

 

 

Monsieur le premier ministre

Nous vivons dans une démocratie formidable qui permet a un maire d’un commune de 630 habitants de s’adresser au premier ministre de la France avec la conviction d’être lu et peut être entendu

Monsieur le premier ministre, je m’autoproclame prétentieusement le porte parole de milliers de maires ruraux comme moi, qui m’écrivent , me téléphonent  a propos de cette reforme sur les rythmes  scolaires qui heurte leur bon sens, et qui défie la raison

Ce sont des tout petits maires sans ambitions cantonales, régionales, parlementaires, ils sont le rouage serein et apaisé d’une démocratie locale du quotidien

,jamais ,ils n’auraient imaginé pour la plupart émettre une délibération ou une motion pour s’opposer a un décret ,au préfet  ou a l’inspecteur d’académie ce n’est pas dans leurs gênes, ce n’est pas dans leur fonctionnement, vous êtes préoccupé de l’état de la France ,ils sont attentifs a l’état de leur voierie communale ou de leur école primaire, ils sont les hussards de notre démocratie, ils sont confrontés a la réalité opérationnel jour après jour, c’est celle là qui les guide dans cette démarche

c’est cette révolte que je vous demande d’entendre, et de mesurer, elle n’est pas politique ou politicienne, ce n’est pas  un conflit d’une opposition anti gouvernementale, c’est plus important que cela et cela dépasse tous les clivages

Nous avons été traités par le ministre de l’éducation nationale d’insurrectionnels, de délinquants civiques, au lieu de comprendre que le bon sens  du terrain exprimait le caractère irréaliste, dangereux et inapplicable de la mesure dans le cadre de l’égalité républicaine de l’enseignement

 ,il n’y a pas pire erreur que de ne pas reconnaître une erreur, par la présente ,je vous demande quasiment humblement de bien vouloir abroger ce décret qui heurte les élus ,les enseignants et les parents d’élèves ,mais dont je vais me permettre de vous soumettre la fragilité juridique

 

Je ne connais aucun de ces élus qui n’affirme pas la réelle nécessité d’une reforme des rythmes scolaires car celle-ci  constituerait  une réelle ambition et un réel devoir pour notre pays mais qui ne voient, dans ce décret, pas la moindre ambition pour l’école de république qui fait battre le cœur de nos villages

C’est pourquoi au nom de tous ceux là ,je vous assure de notre totale disponibilité pour nous atteler a une feuille blanche et d’écrire ensembles une vraie reforme des rythmes scolaires pour le bien être de nos enfants et pour construire l’avenir de notre nation

Voici monsieur le premier ministre quelques éléments qui témoignent que ce décret est illégal et que nous pourrions avoir des espoirs légitimes que notre démarche prospère au conseil d’état , je formule le formidable espoir que la raison prévaudra, que le courage  conduira a briser les blocages qui ne sont pas rationnels mais passionnels   

Voici l’analyse juridique que nous en faisons

 

Le décret du 24 janvier 2013 est tout d’abord illégal pour violation de l’article 72-2 de la Constitution, qui pose le principe de libre administration des collectivités territoriales. Il est en effet manifeste que ce texte ne donne pas aux communes les moyens nécessaires pour assurer normalement les nouvelles missions qu’il leur confie.

Sur le fondement de l’article 102 de la loi du 2 mars 1982 et des articles 5 et 94 de la loi du 7 janvier 1983, le Conseil d’Etat avait déjà jugé que les transferts aux collectivités locales des compétences jusqu’alors exercées par l’Etat doivent être accompagnés du transfert correspondant par l’Etat à ces collectivités des ressources nécessaires à l’exercice normal de ces compétences, de sorte que ces ressources assurent une compensation intégrale, à la date du transfert, des charges résultant pour les collectivités locales des compétences nouvelles qui leur sont attribuées (C.E. 6 juin 1986, département du Finistère, p. 160).

Le Conseil d’Etat avait en particulier jugé que la compensation doit inclure les dépenses obligatoires de toute nature destinées à mettre à la disposition des élèves les moyens nécessaires à leur éducation (C.E. 10 janvier 1994, Association nationale des élus régionaux et autres, p. 12).

Cette règle d’équivalence entre les compétences confiées aux collectivités territoriales et la compensation financière qui doit en résulter est désormais consacrée par l’article 72-2 de la Constitution, aux termes duquel « tout transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales s’accompagne de l’attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice. Toute création ou extension de compétences ayant pour conséquence d’augmenter les dépenses des collectivités territoriales est accompagnée de ressources déterminées par la loi ».

Le Conseil constitutionnel en a déduit qu’il appartient à « l’Etat de maintenir un niveau de ressources équivalent à celui qu’il consacrait à l’exercice des compétences avant leur transfert » (décision n° 2004-511 DC du 29 décembre 2004).

Ainsi, il ressort des textes et de leur application par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat que la compensation doit être intégrale, qu’elle s’apprécie exclusivement au moment où la compétence est dévolue à la collectivité locale et qu’elle comprend toutes les charges indispensables à l’exercice de la compétence transférée.

Au cas présent, le décret du 24 janvier 2013 a prévu une augmentation du nombre de demi-journées sur lesquelles sont réparties les 24 heures d’enseignement que comporte la semaine scolaire, ce qui aura pour effet de contraindre les communes à proposer aux enfants davantage d’activités périscolaires, dès lors que le temps de présence des enfants à l’école ne sera plus intégralement consacré à l’activité d’enseignement.

Par application des règles précitées, il appartenait à l’Etat de prévoir la compensation des charges supplémentaires ainsi imputées aux communes en leur attribuant les ressources leur permettant de les assumer.

Le décret, qui s’en est abstenu, est illégal.

          Mais il y a plus.

Ainsi qu’il a été indiqué ci-dessus, l’obligation dans laquelle les communes vont se trouver de mettre en place de nouvelles activités périscolaires liées à la modification des rythmes scolaires va les conduire à supporter des charges financières importantes.

Cette obligation va également les contraindre à recruter, former et gérer de nouveaux agents afin d’assurer convenablement la mission nouvelle que le décret a mis à leur charge.

Il est par ailleurs prévisible que le recrutement de nouveaux personnels va créer un dysfonctionnement important des services communaux dont la structure, souvent réduite, ne permet pas d’assurer convenablement la gestion de nouveaux personnels.

Or, le Conseil d’Etat a décidé, dans un arrêt commune de Villeurbanne du 6 mai 1996 (req. 165.286) que les mesures provoquant un bouleversement dans l’exécution des budgets des collectivités locales violent le principe de libre administration inscrit à l’article 72 de la Constitution.

Tel est bien le cas du décret du 24 janvier 2013, dont l’application va perturber gravement le fonctionnement continu et régulier du service public de l’éducation et engendrer des dysfonctionnements coûteux pour les communes, et en particulier pour la commune exposante.

Ce décret est ainsi entaché d’illégalité.

          L’illégalité du décret du 24 janvier 2013 devra encore être constatée pour violation du principe constitutionnel de clarté et des objectifs de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme.

En effet, le décret passe totalement sous silence l’obligation que son application va mettre à la charge des communes, consistant à assumer des activités périscolaires bien plus importantes que celles qu’elles avaient pu organiser avant son entrée en vigueur.

Le décret prévoit ainsi un transfert de compétences en direction des communes, sans même évoquer un tel transfert.

Il méconnaît ainsi le principe et les objectifs de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité de la norme, en s’abstenant de préciser la teneur des obligations dont il prévoit le transfert aux communes.

Monsieur le premier ministre, je vous remercie de l’attention portée et du fait que vous mesuriez cette démarche comme une belle illustration d’une démocratie vivante, comme tous mes collègues je me tiens a votre disposition et vous prie de croire en l’expression de ma plus  haute considération

 

christian schoettl

maire de janvry

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commentaires

A
Je me pose la question, mais j'ai l'impression que ce n'est pas le premier transfert larvé. Vous auriez pu parler du principe de gratuité.
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