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20 décembre 2011 2 20 /12 /décembre /2011 08:25

volé dans marianne

 
Depuis une semaine, un petit village de pêcheurs du sud de la Chine, s'est soulevé contre les expropriations de terres. La mort d'un des leaders du mouvement dans des conditions troubles a mis le feu aux poudres. Vivant sous blocus policier depuis jeudi dernier, en auto-gestion, les manifestants se réunissent tous les jours pour discuter des suites à donner au mouvement. Sous la pression des habitants, tous les fonctionnaires ont quitté le village. Le Parti Communiste a perdu le contrôle. Un symbole.



C’est un petit village de pêcheurs chinois qui donne des sueurs froides à Pékin. Wukan, 13.000 habitants, situé dans la province du Guangdong est devenu en une semaine le symbole de l’expression du ras-le-bol chinois. Ce que certains appellent déjà le « siège de Wukan » a commencé en septembre. Les habitants avaient manifesté par centaines contre l’expropriation de leurs terres par les autorités locales qui les revendaient au prix fort à des promoteurs immobiliers.

 Les protestations ont pris une toute autre allure ces derniers jours après la mort  en garde à vue de Xue Jinbo, un représentant des manifestants. Décédé de mort naturelle suite à une insuffisance cardiaque, selon les explications officielles, sa fille a donné une interview à un magazine de Hong-Kong pour expliquer que son père n’avait pas de problèmes cardiaques et que la famille avait constaté des ecchymoses et signes de sévices sur l’ensemble de son corps : «  Ses mains étaient gonflées et il y avait des contusions sur ses poignets. Il  avait des blessures et il semblait que son pouce avait été tiré en arrière et brisé. Sur son dos il y avait beaucoup de marques montrant qu'il avait été battu ».

Un témoignage qui a mis le feu aux poudres.  Face aux manifestants, le gouvernement chinois a fait boucler le village par un millier de  policiers en armes, empêchant l’eau et la nourriture de rentrer dans le village et les habitants d’en sortir, et censurant toutes les recherches qui mentionnent « Wukan » sur les réseaux sociaux. Mais la solidarité des villageois et des blogueurs, l’arrivée dans le village de quelques journalistes ont permis de contourner ces mesures.

Globalvoices reproduit le témoignage de @milpitas94035 sur twitter: « Vers 4h30 ce matin (11 décembre), dans le village de Wukan, district de Lufeng, province de Guangdong, plus d’un millier de policiers armés ont tenté d’entrer dans le village pour procéder à des arrestations. Se prévenant les uns les autres, plus de 5000 villageois s’armèrent de bâtons et firent face à la police. Lors de l’affrontement, la police tira une cinquantaine de bombes lacrymogènes. Les villageois furent contraints de battre en retraite vers 7 heures du matin, à la suite de quoi la police quitta également les lieux. Le bruit courrait que d’autres manifestations avaient lieu dans des villes avoisinantes. »

Les autorités tentent d'acheter les manifestants
Wukan, le petit village rebelle qui fait trembler Pékin
Si les troubles sociaux sont de plus en plus fréquents en Chine, l’envoyé spécial du New-York Times décrit des affrontements particulièrement longs et s’étonne de l’unité des habitants de Wukan rassemblés derrière les leaders. Depuis le début du conflit, le village vit en autogestion. Les fonctionnaires ont quitté les lieux, ni police, ni administration et des débats sur la place centrale du village pour organiser le mouvement. Blogueur et journaliste américain, Tom Lasseter a pu rentrer dans le village grâce à la complicité de certains villageois : « Le résultat est presque impensable dans la Chine d’aujourd’hui : une bande de terre n’est plus sous la gestion directe du Parti Communiste et de ses fonctionnaires » écrit-il.

Constatant l’inefficacité de la répression pour calmer les ardeurs des villageois, les autorités ont choisi d’acheter les leaders du mouvement. Une trentaine d’habitants se sont ainsi vus offrir du riz et de l’huile alors que l’approvisionnement se faisait de plus en plus rare. En contrepartie, ces villageois ont dû signer une feuille blanche « susceptible d’être manipulée pour montrer plus tard leur soutien au gouvernement » commente l’envoyé spécial du Daily Telegraph dans la province du Guangdong.
Diviser, taper et corrompre pour régner. Des vieilles recettes qui n'en sont plus...Les autorités ont tout juste réussi à retourner une centaine de personnes.

Wukan symbolise le cauchemar du PC chinois. Des protestations locales, une répression maladroite et inefficace qui mobilise finalement un village entier.
Comme le plus souvent en pareils cas, c’est la légitimité des autorités locales, plus que celle du Parti, qui est mise en cause. Les cadres arrivant en dernier recours une fois l'ordre restauré pour négocier et éventuellement assurer les « victimes » du soutien de Pékin. (cf. l’affaire du TGV chinois).

La multiplication des insurrections de province
Mais le siège de Wukan est un observatoire à plus d’un titre. Rarement la Chine avait connu tel mouvement, symbole de  l’exaspération des chinois à l’égard de la corruption, notamment au niveau des potentats locaux. La disproportion des moyens  et les méthodes mises en œuvre par Pékin pour faire plier les insurrections de province témoignent de l’inquiétude du Parti face à leur multiplication. Si le Parti se défausse systématiquement sur les autorités locales, ses dirigeants ne sont pas dupes de l’ampleur des  mécontentements et de la perte de crédibilité de tout ce qui incarne l’autorité publique. Journaliste politique, Zhu Zhiyong, souligne néanmoins qu'une fois n'est pas coutume, « les manifestants ont ouvertement appelé à la fin de la dictature. Ce sont les premiers conflits sociaux à mettre en avant un programme politique ». De quoi expliquer le souci d'éviter la contagion.

En 2010, officiellement, les dépenses de sécurité publiques chinoises étaient supérieures à celles du budget de défense. En augmentation de 15, 9% par rapport à 2009. Le budget prévisionnel pour 2011 prévoyait encore une hausse de 13%. Une flambée des dépenses qui donne une idée du souci de Pékin de « traiter » les désordres sociaux à l’échelon local, pour éviter une flambée des violences.
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commentaires

B
Je suis tres admiratif de ces opposants, quels qu ils soient. je ne sais pas si j aurais ce courage. j ose me dire dire que oui, mais au fonds, je n en sais rien.car nous, nous pouvons comprendre<br /> la situation d ensemble; mais eux? qui la vivent...
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