hier, nous étions plus de trois cents a nous retrouver pour jerome,
il n'y a pas d'adieux a faire ,il est dans la mémoire de chacun de nous et donc il est vivant
un grand merci a tous les présents ,notre amitié a tous ceux qui ne pouvaient pas être présents, a tous ceux qui sont venus des quatre coins de la France pour se réchauffer le cœur ensembles,
une fierté que cette tribu d'être humains partageant les mêmes larmes et les mêmes émotions
on m'a demandé ,après la cérémonie, de publier ce que j'avais essayé de dire
Souvent, dans bien des communes ,un employé municipal, c’est une silhouette équipée d’une chasuble fluo ,d’un bonnet de laine et parfois d’un balai ,des hommes sans visages ,sans presque de prénoms, que les citoyens voient œuvrer sous le vocable de « municipaux « …
pas chez nous ! ,pas à janvry !
ce sont des hommes ,des visages ,des prénoms ,des surnoms ,des amis ,des gens avec qui nous travaillons, rions ,mangeons ,voyageons, imaginons les projets cote a cote
Chez nous, ils s’appellent Jérôme ,jean pierre, joan, kiki, vincent ou miss boulettes , en fait, même le mot « employé » n’est pas adapté
C’est, sans doute, ma mémoire qui trie les choses, mais j’ai la sensation que mon premier souvenir de Jérôme se situe un jeudi de première représentation d’un de nos spectacles assis sur les gradins de gauche ,
on m’ a dit qu’il était revenu le vendredi suivant ,puis le samedi, puis le jeudi d’après et ainsi de suite en fait tous les jours
Je crois que ces soir-là ,il a eu comme l’impression qu’il était arrivé ,qu’il avait trouvé, là où il voulait vivre et travailler
je me trompe , peut-être, mais pour avoir fait défiler des milliers de photos ces derniers jours ,c’est quelqu’un d’heureux et tout sourire que je vois sur les photos
16 ans d’aventures communes ,de défis ,de folies en tous genres ,16 ans qui l’ont rendu indispensable, homme orchestre ,il anticipait ,prévoyait , et le faisait aussi à sa sauce
Oublié l’employé communal ,remplacé par le compagnon d’armes ,l’engagé volontaire ,l’indispensable
,du Jérôme en yeti tirant la charrette du père noël ,a la tenue de policier municipal ,en convoyeur de lamas ,de chameaux ,,du cuisinier pour la table des gaulois ,au contrôleur des caméras de sécurité, de l’acteur dans nos spectacles, l’homme du petit marché , ou des décorations pour la chasse aux œufs ,la liste est immense des rôles que cet homme endossait ,parfois avec jubilation, toujours avec une énergie hors du commun,
mon ami pierrot dans le sud de la France ,a une expression que beaucoup connaissent ici ,il dit des feignants « ceux là le travail ce n’est pas leur métier ,pour Jérôme ,c’était l’inverse il finissait par donner l’impression que le travail c’était un loisir
Que l’on soit bien d’accord ,c’était aussi une tête de cochon, et quand il avait quelqu’un dans le nez ,la personne ne rigolait pas ,certains de ses collègues ont des souvenirs cuisants, certains bénévoles aussi, ,car il était capable de vraies vacheries, et il leur menait la vie dure, très dure ,visiblement c’est sans rancune puisque la plupart sont là
pour moi ,il y a eu deux Jerome ,celui de la période sombre où il se cherchait et dont la vie privée était compliquée ;et où seuls ses enfants étaient un phare dans la nuit
et puis celle où il a connu sabrina et où il a trouvé un équilibre et la lumière
merci a elle ,de cette complicité amoureuse capable de soulever des montagnes et donner du sens a la vie
C’est dans cette même salle où nous étions pour les marier ,
comment ne pas se réjouir de ces moments heureux ,
de ce voyage au monténégro ,il y a quelques mois ,
de son anniversaire fêté là bas avec les amis,
personnellement heureux de ces instants qu’ils ont passé tous les deux dans le sud chez moi ,de la piscine où il barbotait des heures
de cette folie du salon des dromadaires où il s’est jeté dans la bataille pour que cette folie réussisse ,
a titre personnel ,je perds quelqu’un de précieux ,l’homme de tous les instants ,de tous les coups durs ,de tous les coups de main
j’ai toujours pu compter sur lui et je crois qu’il a pu toujours pu compter sur moi
Jerome a su être estimé ,respecté ,suivi ,bien au-delà d’un employé communal
il était ici chez lui ,et il veillait a chaque jour améliorer la qualité de vie dans cette ferme ,
aucun d’entre nous n’imagine qu’il ne le verra plus traverser la cour ,
chaque matin depuis 16 ans nous prenions le café a 8H30 ,ce vide a l'auberge quand j’ouvre la porte est inadmissible et nous ne pouvons pas l’intégrer.
quand j’arrivais le matin et que je disais « les enfants, cette nuit ,j’ai eu une idée » jerome faisait semblant d’être accablé ,mais il avait un grand sourire a l’idée du truc impossible dans lequel je voulais les entrainer
Quand nous ne savions pas, c’était « demande a jerome « et quand on nous demandait ce qu’il y avait a faire « va voir jerome »
celui qui nous a tous rendu des services simplement sans faire de bruit et sans étalage nous plante, alors que nous avons tous besoin de lui
A ses enfants ,j’aimerai dire combien il vous aimait ,nous avons partagé ses joies ,ses peines ,ses espoirs , quand il parlait de vous ,mais quoiqu’il arrive il vous aimait ,
il y a ,un peu de lui, en chacun de vous ,soyez en fiers et allez le chercher au fond de vous-mêmes
toutes ces personnes qui sont dans cette salle vous prouvent a quel point il était aimé et respecté
quoi de mieux ?
quelle plus belle leçon de vie ?
quelle fierté d’avoir un père si estimé !
quel plus bel exemple pour une enfant ?
Quand quelqu’un se tue dans un accident ,c’est la vitesse ,l’alcool, la route mouillée ,un pneu qui éclate ,un chauffard en face ,
en tout cas, on se raccroche a une raison, sinon on cherche un coupable ,c’est nécessaire ,c’est de l’ordre de la survie pour les vivants
j’aimerai vous dire que cette mort brutale, stupide ,accidentelle doit vous être insupportable, elle l’est, pour nous tous
et nous comprenons tous qu’il serait tellement rassurant qu’il y ait un responsable, un coupable sur qui cristalliser sa peine en rancœur
c’est pour cette raison ,que la plainte que ses enfants ont déposé pour homicide involontaire et qui vise la mairie nous peine, mais nous la comprenons ,
nous le comprenons d’autant mieux si c’est l’amour qui vous guide
il est difficile d’être suspecté d’être un assassin, d’être le meurtrier de son ami
et je suppose que Jérôme n’aurait pas aimé, mais c’est une réaction humaine et donc qu’il nous faut accepter considérant les circonstances,
encore une fois tant que le seul motif est noble ,seulement l’amour
(commentaire : rien dans l’enquête de gendarmerie ,a notre connaissance ,ne peut accréditer ou justifier une telle plainte, nous laissons a la justice le soin de pousser toutes les investigations nécessaires et nous remercions les services de gendarmerie dont la rigueur dans l’enquête nous préserve de toute supposition odieuse )
ses enfants ,il vous aimait ,il vous espérait ,il vous attendait
alors oui, Jérôme était quelqu’un a qui l’on pouvait tout demander ,prêt a rendre service a chacun
un couteau suisse amoureux des animaux et de la vie ,au point que cela le démangeait d’acheter le chameau qui est dans le pré sur la route de marcoussis ,du coup ,on en a mis un aujourd'hui pour l’accompagner
j’ai une pensée pour tous les bénévoles et notamment pour ceux qui ont assisté a ses derniers instants, une pensée forte pour kiki, pour serge et tous les autres ,entre tous une fraternité réelle s’est installée
jamais je n’ai ressenti aussi fort le sentiment que nous étions une communauté ,une tribu ,qui se resserre dans les coups durs ,les coups du destin, chacun a notre manière, mais avec beaucoup d’amour,de tendresse ,d’émotion
sans doute Jérôme ,où qu’il soit, doit être fier de vous tous ,de votre présence aujourd’hui comme une forme de reconnaissance du bon homme qu’il était
mais aussi depuis ce jour maudit ,le bien que cela fait de vous voir ,de vous embrasser ,de vous serrer dans nos bras ,
»Jérôme , j’ai eu une idée cette nuit » « ce serait bien que tu reviennes
et comme tout ,on s'est retrouvés sous un doux soleil pour essayer de réaliser ce qui nous tombait sur la tête ,en fait heureux les hommes et les femmes qui ont cette chance de partager ainsi les joies et les peines