je reprends mon récit où je l'avais abandonné
mr joseph adorait un peindre,un tableau par jour au moins et surtout et avant tout des images resurgies de sa mémoire d'enfant de janvry
L’époque aussi où la forge de monsieur joseph et surtout de son père battait son plein, mais voyait arriver la mécanisation
celui qui remonte la rue du marchais en observant bien, découvrira des anneaux scellés dans les murs des façades des maisons qui remontent ainsi jusqu’ a la forge ,car, en fait, le lundi matin ,sagement alignés le long de la rue et venues des fermes se trouvaient les bêtes qui avaient besoin d’un ferrage
ma jument est sans doute le dernier cheval que mr joseph a jamais ferré, dieu sait s’il avait une dextérité folle pour travailler le fer, mais pour le ferrage il avait un peu perdu la main ! et avait mis a ma petite jument des fers de cheval de labour comme si on avait chaussé une jeune fille avec des bottes de taille 48 !
La rue du marchais, le lundi matin devenait donc une sorte de foire de maquignons avec les bêtes attachées aux anneaux tout le long de la rue montante et les vachers et garçons de ferme a discuter en attendant leur tour
en haut on entendait battre le fer
A l’Age où je pêchais le goujon ,les tracteurs avaient pris le pas ,la rue avaient perdu ce rendez vous quotidien
sur la place, Christiane tenait son bar épicerie où le beurre avait souvent attendu le client et dont le cours suivait aussi la tête du client ,un bar bruyant qui avait la préférence des chasseurs et des boulistes qui occupaient l’arrière de l’église
ensuite le café du père lucas, avec sa pompe a essence, sa terrasse en extérieur,ses faux colombages et son enseigne où l’on pouvait « apporter son manger »
chez lucas ,qui faisait aussi tabac ,surtout tabac a priser,le « gris » et gitanes mais ,il y avait une délicate vitrine avec la balance en bronze pour peser le tabac ,un tourniquet avec les cartes postales de janvry très sépias, peu en couleurs, qui révélaient une guerre d’éditeurs entre les cafés de la place
et surtout sur la droite en rentrant, pour nous, les gosses ,il y avait la réserve avec les fils ,les hameçons et les bouchons ,ressource indispensable au regard de ce que nous perdions de matériel accroché aux ronces et aux fougères qui nichaient dans le mur des douves
chez Lucas ,c’était plutôt les vieux a gapettes avec la gitane ,le comptoir était petit et trône désormais dans notre foyer des bois .
La pompe a essence a été longtemps une pompe a bras avant de se moderniser
dans ma mémoire d’enfant, c’était la marque avia ou star
Enfin la bonne franquette toujours restée a cette enseigne même si "dans le temps » elle s’appelait l’hôtel des voyageurs » et même si un temps elle est devenue le Bacchus friand, elle revenue dans les années 90 a ses fondamentaux
Madame cousset était le maitre des lieux , petite bonne femme hyperactive et autoritaire
je crois, mais je me trompe peut être qu’il y avait anguille sous roche entre monsieur lucas et madame cousset !
Pour nous, les douves étaient l’observatoire idéal durant les heures d’attente avant que d’espérer qu’un bouchon s’enfonce frénétiquement et que notre cœur batte plus fort
, La bonne franquette, c’était pour nous les mômes « la bonne table » quand on pouvait se payer un diabolo menthe je ne peux jamais en boire un, sans penser a ces instants, a chacun sa madeleine de proust ! ,
c’était aussi la cabine téléphonique de janvry avant d’être récupérée par monsieur lucas et bien plus tard par pierrette beslot femme du garde champêtre indemnisée pour « tenir » le téléphone public ! « et cela ce n’est le moyen âge ce sont les années 70 !
j’ai toujours pensé que cette indemnité avait été créé, pour faire un petit plus, pour essayer d’attirer un employé communal dans ces années où la France était en plein emploi et où il n’était pas facile que cela de recruter
En attendant la cabine publique était a la bonne franquette ,un téléphone en ebonite avec un poussoir latéral qu’il fallait agiter plusieurs fois pour « faire » de l’électricité et obtenir l’opératrice
,cérémonieusement madame cousset ,tendue comme un arc, annonçait « ici le 1 tout seul a janvry » ,le 1 tout seul a JANVRY restera à vie gravé dans ma mémoire et celui qui aujourd’hui a le 016490 0001 a hérité du numéro de la première ligne téléphonique arrivée sur janvry
Le grand évènement, dont je ne me souviens plus de fréquence (madame beauchet me glisse que c'était le mercredi) car j’étais vraiment minot ,c’était l’arrivée du cinéma ambulant ,toujours a la bonne franquette
on débarrassait la salle du fond et le monsieur déballait tout de sa voiture et projetait « le » film
sincèrement aucune mémoire de plus, sinon que cela remplissait la salle
L’autre visite spectaculaire pour nous était le bouilleur de cru qui s’installait place de la croix verte a la saison et où chacun amenait ses tonneaux de fruits macérés pour ne pas dire pourris, là encore on les voyait gouter au pied de l’alambic sans avoir le droit de participer ,sans trop de précautions les matières résiduelles partait dans le fossé qui rejoint la salmouille